L’étude menée par l’Institut Ludwig-Bölkow-Systemtechnik (LBST) sur l’approvisionnement énergétique pour l’avenir1 dégage quelques réponses. La rareté croissante des énergies d’origine fossiles tirées du pétrole, du gaz naturel, du charbon et de l’uranium va nous forcer à utiliser de plus en plus d’énergies renouvelables d’origine solaire et éolienne, donc des énergies orientées vers la production d’électricité. A cet égard, la question « Quel carburant pour les autos ? » devient « Sous quelle forme faut-il stocker l’énergie pour la propulsion des autos ? ».
Comme on sait, l’électricité a des caractéristiques différentes des énergies fossiles. L’usage de l’électricité requiert un couplage entre consommation et production. L’électricité peut être stockée, mais au prix d’une perte substantielle qui est due au rendement médiocre des systèmes de stockage.
Mais le rendement du stockage importe peu si l’électricité stockée provient d’une énergie gratuite et surabondante, comme les énergies solaire et éolienne justement. Le prix de cette électricité juste au moment de son déstockage dépend des coûts d’amortissement et d’entretien des systèmes de capture et de stockage uniquement.
Les biocarburants et la biomasse ne sont pas une solution viable pour le secteur des transports. Déjà parce qu’il est insoutenable, à mes yeux, de mettre des surfaces agricoles en concurrence entre la production de carburants et l’alimentation des êtres humains dont les peuples les plus pauvres sont les premiers touchés. Ce qui induit une concurrence sous jacente pour l’eau nécessaire à l’homme et à la croissance de la biomasse ; et pour les engrais nécessaires à la croissance de la biomasse et grands consommateurs d’énergie.
Pour le stockage de l’énergie dans les autos, la densité d'énergie représente l'énergie par unité de volume sous forme de carburants dans les réservoirs, ou d’électricité dans les batteries des voitures. Dans le diagramme, on compare la densité d’énergie des carburants et des batteries pour la traction potentielle des voitures.
On notera dans ce diagramme que les batteries Lithium-Ion ont une densité d’énergie d’un ordre de grandeur 10 fois moindre que l’hydrogène liquide. Alors que la densité d’énergie de l’hydrogène liquide est d’un ordre 3 fois moindre que l’essence.
L’essence (et le diesel) sont des hydrocarbures issus de la distillation du pétrole. Leur combustion relâche des GES. Ces carburants peuvent être mortels en cas d'ingestion et de pénétration dans les voies respiratoires ; ils peuvent provoquer le cancer.
Le méthanol CH3OH se présente sous la forme d’un liquide léger, volatil, incolore, inflammable, toxique en cas d'ingestion et de contact cutané ou d’inhalation. Le méthanol est dangereux pour les yeux et peut rendre aveugle. C’est le plus simple des alcools. Le méthanol brûle dans l'air en formant du dioxyde de carbone CO2 et de l'eau : 2 CH3OH + 3 O2 → 2 CO2 + 4 H2O. On produit du méthanol par reformage du méthane CH4 par la vapeur d’eau, puis par catalyse du CO sous produit du reformage. Le méthane est un composant du gaz naturel d’origine fossile. Quand il est relâché dans l’atmosphère, le méthane contribue 21 fois plus à l’effet de serre que le CO2.
Moins inflammable que l’essence, le méthanol est cependant peu utilisé dans les moteurs à combustion interne du fait de la corrosion de certains métaux dont l’aluminium. Il ne peut donc pas être utilisé dans les moteurs à essence modernes sans modification du moteur.
Les piles à combustible à méthanol direct ou DMFC (Direct-Methanol Fuel Cell) produisent de l’électricité. Leur efficacité énergétique est faible comparé à d’autres piles à combustible. C’est pourquoi elles sont principalement utilisées dans des appareils portables. Les rejets de la DMFC sont le dioxyde de carbone CO2 et la vapeur d’eau H2O.
Les dangers du méthanol pour la santé, sa contribution à la production de GES mauvaise pour le climat, sa production liée au gaz naturel d’origine fossile, et les difficultés techniques liées aux moteurs pour la propulsion des véhicules, écartent le méthanol comme carburant potentiel.
L’hydrogène H2 est stocké sous forme liquide ou gazeuse. Les expériences avec l’hydrogène comprimé à 700 bars pour la propulsion des véhicules sont plus satisfaisantes qu’avec de l’hydrogène liquide. D’une part, on économise l’énergie nécessaire pour réfrigérer et pour comprimer l’hydrogène dans sa forme liquide. D’autre part, l’hydrogène comprimé à 700 bars présente une densité d’énergie d’un ordre de 10 fois plus grand que les batteries au lithium. On peut faire facilement 300-400 Km avec un réservoir d’hydrogène à 700 bars de capacité habituelle.
On produit de l’hydrogène H2 soit à partir des hydrocarbures, soit avec de l’électricité par électrolyse de l’eau. Pour des raisons historiques, c’est la filière des hydrocarbures qui est la plus développée : On obtient de l’hydrogène par reformage d’hydrocarbures. Ce procédé présente l’inconvénient pour le climat de produire du CO2 qui est un gaz à effet de serre. C’est donc la filière de l’électrolyse de l’eau qui doit être retenue pour la production d’hydrogène.
L’hydrogène H2 est le carburant vert de l’avenir. C’est un des moyens de stocker les énergies renouvelables intermittentes provenant du soleil et du vent et produites respectivement par des panneaux photovoltaïques et par des éoliennes. Le stockage de l’électricité en H2 peut ainsi se faire localement, au plus près de la production d’énergie renouvelable. On dispose ainsi localement du carburant vert pour les véhicules à hydrogène de l’avenir.
Cependant, l’hydrogène est un gaz extrêmement inflammable. Voici quelques extraits de sa « Fiche de Données de Sécurité » :
- Sous pression il peut exploser sous l'effet de la chaleur. Il peut causer l'asphyxie à concentration élevée. Ne pas éteindre une fuite de gaz enflammée, une réinflammation spontanée et explosive peut se produire. Tenir à l’écart de la chaleur/des étincelles/des flammes nues/des surfaces chaudes. Ne pas fumer. Il faut stocker le récipient dans un endroit bien ventilé, à température inférieure à 50°C. Entreposer à l'écart des gaz oxydants. L’hydrogène n’a pas d'effet connu sur l’environnement et le climat.
Dès lors, puisque des raisons climatiques et environnementales nous dictent de stocker l’hydrogène localement, on veillera particulièrement à construire des bâtiments adaptés. Les réservoirs devraient être situés nettement sous le niveau du sol, dans une pièce disposant d’une aération naturelle continue, et conçue pour éviter les fortes chaleurs l’été. Cette pièce de stockage ne doit pas être utilisée pour contenir d’autres appareils, comme l’électrolyse, une pile à combustible ou des appareillages électriques de gestion et de contrôle, ni servir pour d’autres stockages.
La batterie est un moyen adapté à l’automobile et à l’électricité d’origine renouvelable qui est surabondante. Pour avoir la meilleure densité d’énergie, les batteries au Lithium se sont imposées avec de nombreuses variantes.
L’automobile a besoin de batteries au Lithium de grande capacité. Elles présentent l’inconvénient de chauffer. Un système de refroidissement résistant au gel est alors nécessaire. Certaines batteries au lithium se rechargent plus rapidement que d’autres, sur des prises de courants différentes :
- 220 V ou 400 V triphasé
- 10, 16, 32, 64 Ampères ou plus.
Les batteries aux nickel-hydrures métalliques NiMH se sont imposées dans des millions de voitures hybrides pour leur absence d’effet mémoire et leur coût, bien qu’elles aient une densité d’énergie inférieure à celles au Lithium. Il s’agissait seulement de récupérer l’énergie du freinage et même au frein moteur, grâce aux moteurs électriques agissant comme dynamo. Puis de réutiliser cette énergie dans les moteurs électriques pour la traction du véhicule. Quand les voitures hybrides sont devenues rechargeables sur le réseau, les batteries NiMH ont été remplacées par des batteries au Lithium : par exemple la Prius de Toyota.
Il existe deux catégories de voitures hybrides. Celles qui donnent la priorité à la traction tout électrique sur la distance maximale, puis se servent du moteur thermique (essence ou diesel) ou d'une pile à combustible à hydrogène pour produire l’électricité nécessaire pour poursuivre le voyage aussi longtemps que le permet le réservoir de carburant : la Volt de General Motors ou l’Ampera d’Opel avec un moteur à essence; la HyKangoo.ZE de Renault et Symbio FCell. Et celles qui donnent la priorité au moteur thermique, et se servent de l’électricité comme un appoint : la Prius+ Plug-In de Toyota ou les Lexus hybrides.
Nous avons vu qu’un moyen de stocker l’électricité localement est l’hydrogène. Il favorise sa disponibilité locale pour les véhicules disposant d’une pile à hydrogène. Au stockage local d’hydrogène, on peut adjoindre une pile à combustible pour produire de l’électricité disponible localement pour la recharge des batteries des voiture rechargeables, et pour la consommation électrique résidentielle locale.
L’autre moyen de stockage des énergies renouvelables est centralisé : L’électricité d’origine renouvelable sert à pomper de l’eau d’un bassin inférieur vers un bassin supérieur. Ensuite, la chute d’eau actionne un certain nombre de turbines permettant d’adapter la production d’électricité verte à la demande des consommateurs. C’est la solution retenue par le Grand Duché de Luxembourg pour commencer à massifier sa production d’électricité verte !
En conclusion, on constate qu’il est plus efficace, dans un premier temps, d’utiliser l’électricité renouvelable dans des véhicules disposant de batteries au Lithium. Mais comme le Lithium n’est pas très abondant sur notre terre, nous serons inéluctablement amenés, dans un second temps, aux véhicules à pile à hydrogène. La transition passe par des installations locales de stockage en hydrogène H2, comprenant l’électrolyse de l’eau, des réservoirs d’hydrogène, et la pile à hydrogène produisant de l’électricité en fonction de la consommation locale demandée. La pile à hydrogène sera indispensable aux véhicules électriques rechargeables qui continueront à exister encore longtemps après l’avènement des véhicules à hydrogène.
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(1) Future Energy Supply, Dr. Werner Zittel, Ludwig-Bölkow-Systemtechnik GmbH (LBST), conférence du 31 mars 2011 à la Chambre de Commerce de Luxembourg.
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Dernières modifications : 16 Décembre 2013.
Bonjour,
RépondreSupprimerVotre étude sur les carburants est pleine d’intérêt, elle fait apparaître l’Hydrogène comme un substitut avantageux des carburants fossiles carbonés.
Tout en partageant cet avis, je pense que cet intérêt énergétique doit être mis en balance avec le risque d’incendie et d’explosion lié à ce gaz.
Bien sûr tout le monde se souvient ( enfin, peut-être les jeunes l’ignorent-ils) de la triste période des dirigeables gonflés à l’Hydrogène, marquée par plusieurs accidents spectaculaires dont celui du Hindenburg qui condamna définitivement l’emploi de ce produit, aujourd’hui remplacé par l’Hélium.
Plus près de nous, le GPL nous a rappelé qu’on ne joue pas impunément avec un gaz inflammable sous pression. Les meilleurs dispositifs de sécurité sont sans effet s’ils ne sont pas contrôlés par des personnels compétents. Un membre de ma famille a failli le payer de sa vie et en garde de graves séquelles, à cause d’une explosion provoquée par une fuite de gaz dans l’habitacle, due à une soupape de sécurité défectueuse non détectée au cours d’un contrôle par un professionnel.
L’Hydrogène est un gaz extrêmement léger, capable de s’insinuer partout , surtout à haute pression, et qui ne peut être utilisé que dans des installations particulièrement soignées avec des circuits et des matériels dont l’étanchéité est très difficile à garantir.
De plus, c’est un produit extrêmement inflammable, beaucoup plus que le GPL, et pour lequel la moindre fuite ne pardonne pas.
Je reste donc assez réticent sur l’utilisation de l’Hydrogène dans la voiture de Monsieur tout le monde. Je le vois plutôt réservé à des usages à poste fixe pour des applications de stockage tampon ou autres.
Bien sûr les spécialistes nous diront que tout est sous contrôle, mais ne disent-ils pas la même chose à propos du nucléaire ?…
Certes on ne peut comparer les deux, et une explosion de voiture ne cause que des dégâts limités, juste de quoi faire frémir la statistique des morts.
Cent morts par an dans des explosions de voitures, ce n’est « que » 2,5% de plus, mais doit-on accepter ce raisonnement cynique ?
Le problème du carburant, ce n'est pas le CO2 mais le fait que le pétrole va bientôt atteindre son pic de production et le gaz après lui. Ensuite, ce sera la pente descendante.
RépondreSupprimerSans pétrole et sans gaz, sinon en quantité limitée et au prix fort, difficile d'alimenter les véhicules en énergie.
A moins que : http://energeia.voila.net/transport/vehicule_electrique_twh.htm
Mais oui, on peut alimenter tous les véhicules avec de l'électricité, éolienne et solaire surtout.
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